Allégation calcium et vitamine D
100 % végétal Du droit dans mon assiette Penser son alimentation

Ces produits industriels appelés aliments qui trompent le consommateur

(Ce billet a été publié ici la première fois en mars 2018)

Les produits alimentaires que nous proposent nos magasins sont aujourd’hui majoritairement des produits industriels qui n’ont d’aliments que le nom, et dont les emballages, les mises en scène en rayon et les publicités, notamment, trompent le consommateur.

Je vais prendre pour exemple dans ce billet des boissons végétales en vente depuis peu au rayon frais des supermarchés, au milieu de bouteilles de lait et lait fermenté frais, un peu comme si elles contenaient elles-mêmes un liquide sorti du pis d’un bel animal.

D’ailleurs, sur leur face avant, il est indiqué qu’elles sont riches en calcium, et l’on sait bien que beaucoup d’entre nous consomment du lait principalement parce qu’il est source de calcium indispensable pour notre santé osseuse (ce qui est faux, mais c’est un autre débat).

Allégation calcium et vitamine D

Ces boissons sont pourtant des produits ultra transformés, composés essentiellement d’eau et de sucre, au coût exorbitant, de purs attrapes-gogos.

Lait d'amandes frais (1)

Une tromperie habilement organisée

Les concepteurs de ces produits attirent astucieusement les consommateurs en valorisant sur l’emballage des données, réelles, à forte connotation positive : 100% végétal (donc pas de souffrance animale incluse); logo Vegan, riche en calcium et vitamine D “bons pour des os et dents solides”, riche en vitamines B2 et B12, sans colorant, faible teneur en sucres et fabriqué au cœur de la France, Logo FSC.

Dans la liste des ingrédients, le mot “amandes” apparaît en lettres majuscules : de quoi permettre à l’acheteur pressé d’imaginer que c’est là l’ingrédient premier du produit. Ce n’est absolument pas le cas : cette typo a pour fondement juridique que l’amande est un allergène à indiquer d’une façon qui le met en valeur. L’industriel sait bien tirer parti, ici, de ses obligations d’étiquetage. Il fait du seul allergène de son produit l’ingrédient phare de ce dernier, donnant l’illusion d’un lait riche en amandes alors que cela n’est pas du tout le cas.

Sur la face avant du produit, on peut aussi lire que le produit est pauvre en acides gras saturés, et un grand cœur entoure la marque du produit et l’indication 100% végétal, image forte pour donner bonne conscience au consommateur.

Je suis d’ailleurs étonnée qu’il ne soit pas mentionné également “sans gluten et sans lactose”, c’est tellement vendeur de nos jours…Lait d'amandes frais (2)

Pour autant, vous ne trouverez aucune information sur la provenance des amandes, sujet sensible s’il en est.

Aucune non plus sur celle du sucre, ni sur la nature de ce sucre (canne ? Sans doute pas, cela aurait été mentionné car positivement perçu. On peut donc penser que c’est du sucre blanc de betterave qui est utilisé ici).

Rien sur l’eau utilisée (source ? minérale ? osmosée ? etc.)

En d’autres termes, l’industriel qui veut vous vendre cela fait tout pour vous faire croire qu’il pense à votre santé et respecte vos valeurs, alors qu’au fond il vous vend de la malbouffe.

Il est du reste indiqué (voir ci-dessus la 2e photo) que le produit est “à consommer dans le cadre d’une alimentation variée et équilibrée et d’un mode de vie sain”, ce qui relève de votre responsabilité, pas de celle de l’industriel.

Qu’est-ce qu’un aliment ultra transformé ?

C’est un produit industriel qui fait semblant d’être un aliment, qui prétend, à tort, être nourricier pour celui qui le consommera.

Dans son très bon ouvrage Halte aux aliments ultra transformés ! Mangeons vrai, Anthony Fardet nous indique les critères (cumulatifs) de ce type d’aliments, définis par des épidémiologistes de l’Université de Sao Paulo, au Brésil :

  • une longue liste (généralement plus de 5) d’ingrédients [ici eau, sucre, amandes] et/ou d’additifs [ici carbonate de calcium, émulsifiant, stabilisant, vitamines…]   ;
  • des produits artificiels fabriqués industriellement par recombinaison d’ingrédients, donc non fournis tels quels par la nature et dont la matrice* n’est pas naturelle ;
  • des produits tellement transformés qu’on ne discerne plus l’aliment d’origine.
  • le tout dans un emballage très attractif et coloré.

Aliments ultra transformés et maladies d’industrialisation

Anthony Fardet soutient dans son livre précité que les aliments ultra transformés sont lourdement coupables des maladies qu’il qualifie d’industrialisation (et non de civilisation).

Il propose en conséquence un étiquetage des aliments en fonction de leur degré de transformation, ce qui me semble très sensé.

Son livre est vraiment très intéressant et pourrait être étudié par nos enfants à l’école, avec des exercices simples dès la maternelle pour apprendre aux enfants à identifier ce qui est aliment non transformé, transformé ou ultra transformé, leur apprendre à en distinguer les textures, les saveurs, la façon dont leur corps se sent nourri par les uns et les autres, les plaisirs sensoriels qui sont les leurs lorsqu’ils préparent et mangent les uns ou les autres, etc., vous ne trouvez pas ?

En consommer, pourquoi pas, mais sans se faire berner !

Pour en revenir aux boissons végétales illustrant ce billet, il est bien entendu possible d’en acheter si on le souhaite et si cela rentre dans notre budget : chacun de nous est libre et ces boissons ne sont pas toxiques !

Des motivations comme plaisir, ou envie, ou curiosité, ou convenance, ont totalement droit de cité.

Il n’en est pas moins que ces produits ne sont alimentaires, au fond, que parce que l’industriel qui les conçoit est doué pour tenter de vous en convaincre.

Ils ne vous nourriront pas et, surtout, ils ne contribueront en rien à votre santé, voire ils participeront à sa dégradation s’ils composent l’essentiel de votre assiette quotidienne.

Bref, l’industriel trompe le consommateur, et il le fait en toute légalité. La santé des consommateurs n’est pas du tout une préoccupation prioritaire, ni pour l’industrie alimentaire, ni pour le législateur, ne nous y trompons pas.

* Anthony Fardet est spécialiste de cette question de la matrice des aliments, qui est clé. Il a publié de nombreux articles à ce sujet et en propose une synthèse claire et accessible dans son ouvrage précité, Halte aux aliments ultra transformés ! Mangeons vrai.

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6 commentaires

  1. Top cet article et avant de lire que tu l’avais écrit je me disais comme toi : il manque la notion sans gluten et sans lactose!
    Incroyable!
    Mais je trouve que de plus en plus de personne prenne conscience de ce qu’il mange. Au bureau, je sens de plus en plus de personne être à l’écoute. Même si le chemin est long!

  2. Je suis d’accord avec tout ce qui est dit dans l’article sauf cette idée qui revient très souvent d’en faire un sujet à l’école. Ce sujet concerne les parents, les adultes, que l’on peut toucher au moyen des associations et centres sociaux. Toute initiative visant à revaloriser la cuisine traditionnelle est bienvenue: ateliers, echanges de savoirs, fêtes, repas partagés ont toujours du succès. Il s’agit de transmettre le message que les parents ont des connaissances qui ont de la valeur, que la cuisine en famille est source de transmission.

    1. Je suis d’accord, Karine, mais au fond les deux approches sont-elles incompatibles ? Je me souviens qu’enfant j’ai eu quelques cours de cuisine à l’école, et cela m’a aidée à me mettre aux fourneaux, même en ayant toujours vu mes parents cuisiner et en étant associée à certaines de leurs préparations, par exemple. Par ailleurs, l’école peut ouvrir à d’autres saveurs, textures, connaissances, que la famille et la réalité contemporaine est que dans un très grand nombre de familles la transmission alimentaire ne passe pas par des produits frais et cuisinés.

  3. Le journal 60 millions de consommateurs alertait récemment sur la composition ultra trafiquée des produits dits vegan vendus en grandes surfaces

    1. De façon générale, les produits “sans” de grandes surfaces sont ultra transformé, en effet… Particulièrement important de faire sa cuisine soi-même en cas de régime spécifique, non ?

  4. […] Nous n’avons pas de trouble alimentaire à proprement parler, nous mangeons surtout des produits frais, choisis avec soin et gourmandise, des quantités atypiquement élevées de légumes -en témoigne notre poubelle à compost qu’il faut si souvent vider-, relativement peu de sucre voire de sucres au sens large, quasi aucun produit transformé et encore plus rarement des produits ultra transformés. […]

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